L’état d’urgence, quel bilan?

By | janvier 20, 2016

Franois Hollande a jug mercredi « tout fait probable » la prolongation de l’tat d’urgence, qui doit normalement expirer le 26 fvrier. Quel est le bilan de ce dispositif exceptionnel?

Approuvé par les Français massivement après les attentats du 13 novembre mais contestée par les défenseurs des droits de l’Homme, l’état d’urgence pourrait être prolongé après le 26 février. La décision sera prise « dans les prochains jours », a indiqué l’entourage du chef de l’État. L’Express fait le point sur cette mesure.

En chiffres

Selon les sources des ministères de la justice et de l’intérieur, depuis l’instauration de l’état d’urgence, 3099 perquisitions administratives ont eu lieu. Par ailleurs, 542 procédures judiciaires ont été ouvertes. Et 382 assignations à résidence ont été décidées.

De manière plus anecdotique, trois fermetures provisoires des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion ont été déclarées. De plus, un couvre-feu a été ordonné, sans oublier que trois zones de protection de sécurité ont été annoncées. En tout, le bilan s’élève à 366 personnes interpellées, 316 gardées à vues et 500 armes découvertes. Ce schéma donne un aperçu de ces chiffres à la date du 7 janvier 2016.

Des interventions dans les grandes villes

Des perquisitions ont eu lieu entre le 14 novembre et le 15 décembre principalement dans les grandes agglomérations, selon Francetvinfo: Paris, Rennes, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Marseille, Rennes, Toulouse mais aussi Orléans, Grenoble, Agen, Pau, Nîmes, Angers, Bastia, Grenoble, Dijon, Besançon, Colmar, Nancy, Reims, Douai, Amiens, Rouen, Caen, Versailles, Metz, Nancy et Besançon.

LIRE AUSSI >> Etat d’urgence: la France pourrait bafouer les droits de l’Homme

Un régime contesté

En janvier, selon les Décodeurs du Monde, la plupart des infractions n’ont aucun rapport avec le terrorisme. Sur les 464 infractions répertoriées, seules 25 infractions sont en liens avec le terrorisme et 4 concernent les procédures antiterroristes.

Les 21 infractions restantes concernent le délit d’apologie du terrorisme, inscrit depuis novembre 2014 dans le Code pénal. Les procédures s’appuient alors sur les tracts, les documents divers, ou encore sur des posts sur Facebook ou sur des sites de rencontres, découverts lors des fouilles physiques et informatiques.

LIRE AUSSI >> Etat d’urgence: la police cherche drogue et armes pour endiguer le terrorisme

Devant le tribunal administratif, 63 assignations à résidence, deux interdictions de manifester, deux restrictions de la liberté de culte, deux interdictions de vente, une fermeture de restaurants et deux perquisitions administratives ont été contestées. Sur ces recours, 49 recours ont été rejetés, 23 procédures ont en revanche été annulées ou suspendues.

Selon France inter, six mesures d’assignation à résidence ont été annulées totalement ou partiellement. Un cas reste emblématique, celui de militants écologistes qui ont fait l’objet d’une telle procédure.

Des policiers français en patrouille à Saint-Denis le 18 novembre 2015 (illustration).

Des policiers français en patrouille à Saint-Denis le 18 novembre 2015 (illustration).

AFP/KENZO TRIBOUILLARD

Les opposants à la prolongation

Alors que la prolongation de l’état d’urgence jusqu’au 26 février avait été votée à la quasi-unanimité par le Parlement en novembre, sa prolongation fait aujourd’hui débat. La Ligue des droits de l’Homme a annoncé avoir saisi le Conseil d’Etat pour mettre fin, totalement ou en partie, aux mesures contraignantes de l’état d’urgence, qui ne sont selon elle plus justifiées et portent « une atteinte grave et manifeste aux libertés publiques ». La plus haute juridiction administrative examinera dès mardi 26 janvier un « recours en référé liberté » en ce sens, a annoncé l’un de ses représentants, l’avocat Patrice Spinosi.

Par ailleurs, la Ligue des droits de l’homme (LDH) et le Syndicat des avocats de France (SAF) ont annoncé mardi la création à Lyon, comme dans tous les départements, d’un « observatoire des dérives de l’état d’urgence » mis en oeuvre après les attentats du 13 novembre. Concrètement, a expliqué Thomas Fourrey, président de la section lyonnaise du SAF, l’observatoire aura pour but de donner « une vue globale de ce qu’il se passe. Les gens ont peur, et ont honte, c’est un tabou », notamment quand « on vient casser votre porte à 2h du matin, vis-à-vis des voisins ».

Certains institutions judiciaires ont également exprimé leur souci d’être écartées de nombreuses procédures judiciaires. « Nous sommes inquiets. Car un Etat démocratique ne sort jamais renforcé de l’affaiblissement de sa Justice ni de l’accroissement de pouvoirs policiers sans contrôle », avait notamment déclaré le premier président de la cour d’appel de Caen Jean-Paul Roughol.

LIRE AUSSI >> Quand Etat d’urgence rime avec dérapages et descentes opportunistes