Le vicomte serait la proie d’une illumination? Une affaire de bague ayant prétendument appartenu à la Pucelle fait souffler les alizés de l’Esprit Saint sur le Puy du Fou.
Philippe Le Jolis de Villiers de Saintignon, plaisamment moqué sous le sobriquet de « Fou du Puy » aurait-il été désigné par la main divine lorsqu’il vint à acquérir l’anneau de Jeanne d’Arc, une inestimable relique qu’il a choisi d’exposer en une chapelle tout spécialement dédiée en son phalanstère vendéen?
Notre ami Artois, un temps fourré dans la chasuble rédemptrice du vicomte, le Chouan suprême, semble à présent revenu à de plus tièdes ardeurs: il nous confessa tout récemment la genèse de cet anneau qui, ces temps derniers, défraie la chronique jusques à la Roche sur Yon.
« Le vicomte aurait acheté cette bague en Angleterre pour la somme rondelette de quelque quatre cents mille écus ».
– Diantre! Artois, Monsieur de Villiers n’a point lésiné. Est-elle au moins authentique, a-t-elle été réellement passée au doigt de Jeanne?
– Le vicomte n’en démord point et jure sur la Sainte Croix qu’il s’agit bien de l’anneau de la Pucelle. Mais de savants médiévistes chargés d’établir sa véracité se chamaillent comme sanhédrin.
– Querelles d’Allemands!
Pawn Shop de Las Vegas
– Hélas, trois fois hélas, la rumeur assure que Monsieur de Villiers se serait fait arnaquer, gruger, que cette bague ne vaudrait pas tripette et qu’elle aurait été acquise dans un « Pawn Shop » de Las Vegas.
– Mise au clou par un joueur lessivé… Et que compte faire le Chouan suprême?
– Rien, marquise! Que dalle! Ses zélotes sont persuadés de l’authenticité de la relique: les voici à se prosterner et organiser force monstrances à des fins de brandir l’anneau de la Pucelle, symbole de la résurrection chrétienne, étincelant glaive de la croisade contre l’islamisme sanguinaire. Marquise, nous sommes à présent à téter le sein de l’obscurantisme, blottis par la peur des hordes salamistes, prêts à vénérer n’importe quelle babiole, pourvu que l’on lui lui prête des vertus conjuratoires.
– Guérira-t-elle au moins des écrouelles, cette bague magique?
– Marquise, faut-il vous enseigner que tout ce folklore est un peu pipoté? L’on se doit de garder un chouia de raison lorsque les peuples apeurés font leur credo de la phrase de Monsieur Nietzsche, ce philosophe à tête de griffon khortal, qui mandait fort justement que: « Croire, c’est refuser de savoir ».
Voyez, marquise, ces cohortes de disciples au bronzage vanille fraise, à contempler dans l’épectase l’anneau qui délivrera la France de ses plaies, la laïcité et l’islamisme, et lui restituera sa place de fille aînée de l’Eglise apostolique et romaine.
– Voici donc Monsieur de Villiers confit en bondieuserie…
– Pour renfort de potage, marquise, le dessein de dézinguer Lourdes lui est prêté avec une insistance qui, avouons-le, nous intrigue grandement.
– Lourdes, détrônée par le Puy du Fou?!
« Votif pour tous »
– Marquise, l’on prête encore au vicomte l’irrépressible envie de créer un mouvement: « Le votif pour tous ». Il se mande encore qu’il aurait enrôlé Monsieur de Saint Zemmour tout ainsi que le mage Buisson à des fins d’écrire un bréviaire qui serait vendu, le vicomte ne perd pas le nord, à des milliers de fidèles. Le titre en serait fort percutant: « Jeanne, au secours! » La vente dudit bréviaire serait adornée d’une réplique fidèle de l’anneau à des fins d’être porté comme la marque initiatique de l’appartenance au mouvement rédempteur de la Foi chrétienne, rempart contre les impies.
– Nous avons cependant ouï dire que l’affaire était quelque peu gâtée par les Anglais…
– Damnés Rosbifs! Que le Brexit vienne à leur peler le cul! Mordieu, les voici à chipoter, perfides qu’ils sont, en arguant que le « Arts Council of England » n’aurait point délivré une obscure licence d’exportation pour cette joncaille dégotée sur le Boncoin.
– Comte, Artois, nous voici toute ébaubie! Quelle ferveur patriotique!
– Marquise, nos transports nous ont tapissé la langue comme queue de castor trempée de boue…
– Artois, la pépie…
Grenouille de Benito
– Une roteuse à des fins de nous délier la menteuse… Et vous conter un épilogue pas piqué des hannetons.
Voici donc: Monsieur de Villiers, flanqué donc du mage Buisson et de Monsieur de Saint Zemmour font présentement les yeux doux à Mademoiselle Nièce, l’impétueuse Marion de Provence, qui passe pour être davantage cul-bénit que Tatie Marinella.
– La grenouille de Benito…
– Monsieur de Villiers, chaviré par son teint diaphane et sa virginale blondeur, caresse le dessein d’ourdir la réincarnation de Jeanne en ondoyant Mademoiselle Nièce lors d’une gigantesque monstrance allant jusques à Reims où elle serait consacrée, prélude à sa montée sur le trône de France.
– Artois, nous serait-il loisible de vous plagier en affirmant que vous avez forcé sur la bibine?
– Pardieu, marquise, cette affaire d’anneau a quelque peu chahuté nos esprits. Mais nous avouons que l’idée de voir Tata Marine exilée à la Trinité sur Mer par Marion Ière nous séduit grandement.