Sans attendre que le temps daigne enfin s’abeausir, le roi s’emploie à faire pleuvoir… la thune. Et ce n’est point petite bruine: une bonne drache!
Qui vient à arroser professeurs, chemineaux, chercheurs, jeunes, fonctionnaires, éleveurs, petits patrons… Point n’est besoin de brandir un cocktail Molotov: suffirait-il de tendre la sébile?
Point n’est donc besoin de travailler pour se payer un costard, ainsi que le mande fort imprudemment l’arrogant Monsieur de Macron, désormais assujetti à l’impôt sur la fortune.
Par le Diable, comment se doit-on de procéder à des fins de solliciter le roi pour faire pleuvoir l’artiche, l’oseille, le flouze, le fric sur les têtes méritantes?
Notre vieil ami Artois, toujours à fureter chiner, traquer, flairer, nous a livré son secret en nous contant par quel sortilège il était parvenu à se glisser au sein de la confrérie des aboyeurs lors de la Petite audience des oeuvres durant laquelle le roi consent à s’inquiéter du sort de ses sujets, prompts ou rétifs à soutenir sa grande entreprise de reconquête de l’opinion.
L’affaire se passe en petite salle, une sorte de cabinet des maléfices où le comte Le Foll a ses appartements. Une entrée discrète permet aux visiteurs de ne point être vus des gazetiers, toujours à flairer à des fins de faire pleuvoir leur fontaine à fagots.
Ce matin ci était reçu Monsieur de Martinet, une sorte de phoque mal embouché, qui pour la circonstance met la chienlit en le royaume.
Le roi-. Monsieur, ainsi que vous le savez, nous n’abrogerons point la loi El Khomri, pas plus que nous ne supprimerons l’article 2 qui a l’heur de vous fâcher. En revanche, soucieux de ne point vous abandonner une main devant, une main derrière, nous avons consenti à renoncer à la réforme du travail des chemineaux dont vous êtes le héraut.
Monsieur de Martinet-. Le compte n’y est point, Sire, même si vos largesses sont venues fort heureusement panser les plaies des fonctionnaires.
Le roi-. Monsieur, nous sommes las de voir le royaume en asphyxie. Nous avons entendu vos doléances et votre gratitude, Monsieur, n’est point à la hauteur de nos bontés. Nous le regrettons. Aussi avons nous songé à vous offrir le costard de Monsieur de Macron à des fins qu’un homme de votre qualité soit habillé comme il sied de l’être en Cour.
Monsieur de Martinet-. Je ne suis point seul à décider, Sire: mes fidèles sont présentement très vénères contre le comte Valls qui se plait à jouer les adjudants, tout ainsi que Monsieur de Gattaz qui présentement nous insulte.
Le roi-. Nous ferons notre affaire du comte Valls… Quant à Monsieur de Gattaz, nous le savons pique-boeuf et nous le tancerons de circonstance. Nous veillerons à choyer votre jurande à des fins que vous ne perdiez point la face. Nous pourrions ainsi nous inquiéter de verser notre obole et faire que les journées de grève soient payées. Voici notre geste d’apaisement.
Durant une courte suspension d’audience, le roi tint à conférer avec sa garde rapprochée: sur qui se devait-on, à présent, de faire pleuvoir pour conjurer le sort qui accablait l’image du roi?
Le comte Le Foll-. On arrose comme des malades et rien ne monte: les sondages sont exécrables. Mélenchon vous talonne et avant peu, il vous enfumera!
Le roi-. Nous savons cela, mais notre bonne étoile nous indique que le voie que nous avons choisie est la bonne…
Monsieur de Monbeausapin-. Ça va couter une blinde! Depuis le début de l’année, nous avons déjà cramé plus de quatre milliards d’écus!
Le roi-. Par le Ciel, Monbeausapin, cessez de bobillonner comme vieille femme saoule! Monsieur de Migaud s’entend à merveille à camper ce rôle! Il nous inonde de notes alarmistes, assurant qu’avant peu nous allons boire la tasse!
Aboyeur-. Monsieur de Migaud!
Le roi, mezza voce-. Ce damné oiseau de malheur n’était point inscrit sur notre tablette!
Monsieur de Migaud, hors d’haleine, cramoisi-. Sire! Le rouge de nos déficits se peint sur mon visage: nous n’avons plus un radis, plus un kopeck!
Le roi-. J’entends, Monsieur. Auriez-vous, Monsieur, le front de dire que nous flanquons le grisbi par les fenêtres?
Monsieur de Migaud-. Il me faut vous alerter, Sire, sur le fait qu’avant une lustre il nous faudra imprimer des assignats pour payer les augmentations consenties aux professeurs…
Le comte Le Foll-. La roupie de sansonnet, ça c’est notre came!
Monsieur de Migaud-. Je m’arrache les cheveux, Sire!
Le comte Le Foll, balayant sa crinière d’un geste agacé-. Ça nous avait pas échappé…
Monsieur de Migaud-. Pour renfort de potage, Sire, vous promîtes de baisser les impôts! Et ce n’est pas la contribution de Monsieur de Macron à l’ISF qui va nous renflouer, devrait-il pour se faire, mettre son costard au clou…
Monsieur de Monbeausapin-. Voilà plaisante affaire d’arroseur arrosé…
Le Foll-. C’est toi qui l’a balancé?
Monbeausapin-. Si non è vero, è ben trovato…
Le Foll-. Bien joué, Slip de Feu! Gueule d’amour dans la panade, ça c’est du lourd!
Monsieur de Cazeneuve, jusques alors coi comme carpe-. Sire, l’opposition vient à s’inquiéter de devoir un jour payer vos ardoises, arguant que vous serez défait à plate couture et qu’il incombera à votre successeur de gérer un royaume que vous aurez sciemment plombé!
Le Foll-. C’est trop de la balle! Nos ardoises qui pourriraient le règne de nos adversaires, sèmeraient la révolte! Le royaume au bord du gouffre vous supplierait alors, Sire, de rempiler à des fins d’en finir avec la misère et l’injustice d’une droite défoncée à la chicha libérale!
Le roi, rêveur-. Voici qui nous siérait grandement… Mais revenons aux dures réalités du moment: qui n’a-t-on point encore récompensé, gratifié, cajolé…
Le Foll-. Acheté, soudoyé…
Le roi, tout à son rêve-. Les intermittents, c’est fait. Les chercheurs, c’est fait aussi. Les éleveurs, c’est boutiqué. Les jeunes, itou.
Le Foll-. Les vieux…
Le roi-. Ils votent mal.
Cazeneuve-. Mes flics, mes flics!
Le roi-. Du fric pour les flics! En voilà une idée qu’elle est bonne!